
ils ont dit :
...La poésie d'Alain Germoz se
caractérise par la simplicité du verbe et la sobriété du style, qui
tissent une sorte de dépouillement. Marquée de spiritualité, à
certains moments de fantastique, elle est traversée par des mots
récurrents : "temps", "fragment", par exemple. ...
Pour Germoz, le poème est dépassement, ésotérisme par excellence, il
se situe, en passant par les mots, dans l'au-delà des mots, dans ce que
l'auteur nomme "la trace intermittente" qui les
"ombre"...
Patricia Laranco, Diérèse n°37
Un homme libre |
Comment mieux définir que par
la liberté et l'indépendance d'esprit un poète comme l'Anversois
Alain Germoz, fondateur, notamment, de la revue Archipel. C'est
aussi ce que souligne Werner Lambersy dans la lumineuse préface
qu'il donne au présent recueil, La Sandale d'Empédocle, qui doit
son titre à celui d'un des poèmes où Germoz donne la mesure de
son humanisme, de sa quête solitaire et d'un humour dont ses désenchantements
ne se départent jamais. Que ceux qui éprouvent des réticences
vis-à-vis de la poésie découvrent ces textes. Ils y trouveront,
sous une forme à la fois fluide, incisive, dépouillée de tout
artifice et cousine du haiku, une approche simple, directe et
profonde des réalités les plus intimes. Et nourries par la
recherche et le doute permanent de « l'honnête homme » au sens le
plus actif et le plus vaillant du terme. Ils y trouveront cette «
symbiose entre la tentation philosophique et l'intuition musicale »
évoquée par Lambersy qui identifie aussi, avec juste raison, «
une intention de donner la mort au crétinisme ambiant ». En prime
: les malicieux dessins de l'auteur, tracés au fil de la plume
comme des ectoplasmes hasardeux du rêve intérieur.
Ghislain Cotton, le Vif du 04 mai
2007
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"(...) Alain Germoz, né à Anvers
en 1920, (..) est poète. (...) Dans leur dénuement, les mots du poète
se suffisent à eux-mêmes pour dire "l'oubli avant l'oubli",
"l'élan d'un roc/en plein désert/et ton cri sans voix/dans le repli
des dunes". Alain Germoz est arrivé à un âge où l'on écrit
"à mi-voix et à dessins (...)"
Francis Chenot, L'Arbre à Paroles
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"...Germoz est l'auteur (le facteur
dirait Bachelard) de textes qui semblent courts, mais dont les
ramifications multiples et diversifiées méritent largement cette
approche attentive et consciencieuse qui leur a trop souvent été
déniée. C'est que son oeuvre participe d'une volonté d'effacement et de
dépersonnalisation..."
Henri-Floris Jespers, Ca ira n°29,
1er trimestre 2007, numéro très largement consacré à Alain Germoz et
à la Sandale d'Empédocle)
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Alain Germoz est poète et aphoriste,
fidèle à la riche avant-garde anversoise du milieu du siècle dernier.
La Sandale d'Empédocle est un recueil de textes où, selon son habitude,
il refuse de se prendre trop au sérieux mais où le lecteur ne peut
s'empêcher de piquer ci ou là un aveu, une confidence (...)
Paul Van Melle, Inédit Nouveau 212,
mai 2007
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Le livre
Recueil de poésie
accompagné de dessins de l’auteur, sélectionnés parmi ses célèbres scromphales. Ecrits au cours des trente dernières années, proposés non pas dans un
ordre chronologique mais selon une logique mise en évidence par la poète
et éditrice Agnès Caers, ces poèmes et dessins oscillent entre humour
et colère, désenchantement et résistance, à l'exacte position de
l'homme lucide.
L'auteur
Né en 1920 à Anvers,
Alain Germoz a d’abord écrit pour la scène (pièces de théâtre et
arguments de ballets montés à Anvers, Paris et ailleurs) avant de se
consacrer exclusivement à sa carrière de journaliste. Familier de
Seuphor, Franquin, Hergé et de bien d’autres figures marquantes de la
création belge du vingtième siècle, il a fondé en 1992 à Anvers la
revue Archipel, sous-titrée « Cahier de création
contemporaine », qui a notamment accueilli des textes d’Eri de
Luca ou du poète Adonis.
Ce
Germoz, dont j'ai envie de parler ici, avec l'intime conviction d'un jury
le condamnant pour attentat au conformisme, pour comportement déviant et
pour coups et blessures volontaires avec intention de donner la mort au
crétinisme ambiant, au sectarisme littéraire et aux racismes divers ; ce
Germoz, dont je veux témoigner avec un enthousiasme intact, devant le
tribunal des lecteurs, je l'ai connu fort tard mais d'autant plus
fortement (on pourrait dire par surprise) qu'il se cache, le Bougre,
derrière toutes sortes de pudeurs, de modesties, de refus sans
complaisance et d'oeuvres à peine consenties au public à travers
quelques livres, circulant sous le manteau de l'amitié, de la complicité
intellectuelle et celui du défi lancé aux gesticulations jaculatoires de
la notoriété. Car il fait tout à l'envers (à l'Anvers dirait-on à
Paris !) de travers et de traverses. Comme Montaigne, dont il porte plus
loin le salubre héritage, il avance « à sauts et à gambades », «
écrivant chemin faisant et à cheval » sur un Pégase qui, d'un coup de
sabot, fait aujourd'hui encore jaillir les fontaines consacrées à nos
muses, qu'elles soient en robes, en jeans ou toutes nues comme autant de
vérités salutaires. Alain Germoz représente l'esprit achevé de ce que
je ne voudrais pas, mais crains cependant, voir se perdre et disparaître
sans héritiers déclarés : l'homme libre, l'humaniste universel curieux
du local comme du lointain, du semblable comme du différent, ouvert et
rebelle à la fois, sceptique, lucide, amoureux, « humoureux » de
l'existence, réparateur de nuages, passeur de mots par « inadvertance /
Pour la beauté du geste » en « vertébré inclassable / Terré dans une
jungle à nulle autre pareille ». Quelque chose d'indéfinissable
(something in the air), tombé (right from a blue sky) comme la foudre
(before the magic is gone) que l'âme cosmopolite et baroque du grand port
vit naître avec tant d'écrivains francophones et flamands (mais de
toutes les diasporas aussi) et que l'écriture d'un Germoz rend, avec
force et subtilité ; quelque chose qui traverse l'histoire de cette ville
emblématique, entre mer océanique et fleuve (Antwerpen : aan t'werf, au
ponton, au passage avant les grandes eaux du large!), entre croyances et
mécréances, esprit du shtetl, de la commune, nationalisme et
internationalisme, langues véhiculaires, vernaculaires et commerciales,
entre tant de destinations et les fantasmes fiévreux qu'elles enflamment
(Amérique, Baltique et grand Nord, Afrique des colonies...) entre
Weltanschauung, pas seulement latine et germanique, mais entre gens de
terre et gens de mer, paysans et marins, aventuriers ou marchands, entre
spéculations, faillites et fortunes dont la roue tourne sans fin...
Si
la poésie, à travers les mots, se présente comme une symbiose entre la
tentation philosophique et l'intuition musicale, une sorte d'arc
électrique en somme entre les deux extrêmes de ce qui devrait, avec les
mathématiques qui ne leur sont pas étrangères, former un langage
universel, alors Alain Germoz en approche furieusement, sereinement et
obstinément, et que peut-on faire d'autre que de seulement s'en approcher
comme un voleur, un violeur mais surtout comme un enfant qui « erre enfin
parmi les ruines du lendemain » !
Chez
Germoz, jamais le poème n'a perdu le réel de vue, jamais il ne s'est
éloigné de la vie ni égaré en soi ; simplement ses mots disent : ceci
est, ceci élargit la place de l'être dans l'univers, comme l'eau qui
s'en va vers plus large dans l'océan, vers plus haut dans l'azur ou plus
bas dans la terre, vers plus de mystère dans ce feu qu'on appelle
l'amour, la mort, et si souvent les deux à la fois.
Mais
il y a la beauté, ce sentiment de manque, d'inassouvi, d'inachevé,
d'inachevable et d'absence absolue où nous attendons dans ce désir
d'elle « où tout peut-être a commencé?» Werner
Lambersy (préface)
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