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Le désert de l'empailleur

 

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Le désert de l'empailleur, Ghislain Ripault

photo de couverture : Robert Doisneau

2-9523675-5-8 ; 8,00€

 

ils en ont dit :

La voix du texte

Je parlerai du Désert de l’empailleur (éd. Rhubarbe 2006). L’auteur, Ghislain Ripault, en lisait un extrait au mois de janvier dernier à la Halle Saint Pierre, à Paris. Expérience fascinante d’entendre l’auteur lire son texte parce qu’on est dans l’écoute de sa voix. J’aime un texte littéraire pour sa voix, pour la voix réelle ou supposée de l’auteur, pour ce que j’appellerai la voix du texte. La voix et le ton viennent du corps de l’écrivain, mais ils forment aussi pour moi le corps du texte. Il y a dans la culture occidentale un déni de l’oralité. La littérature n’est plus lue à haute voix, sauf lorsqu’elle est portée au théâtre.
L’exemple de Valère Novarina est remarquable mais exceptionnel dans un pays où la voix et le chant ne sont plus travaillés. J’aime un texte pour la voix qui le fait vivre, bouger, remuer. Parfois cette voix n’est pas celle de l’auteur, elle est seulement celle que j’entends ou que j’imagine. On parle souvent du rythme en littérature, mais on oublie l’importance de la voix, du grain de la voix. Et je rejoins ici Barthes dans son analyse du plaisir du texte. Barthes, à ce propos, rappelle que la culture de l’oralité n’est pas la même en Extrême-Orient qu’en Occident. Ce propos me semble digne d’être médité aujourd’hui encore, et plus que jamais.
Comment parler de la voix ou des voix d’un texte ? Quand je lis le roman de Ghislain Ripault, il me semble parfois entendre la voix de Antonin Artaud lisant Pour en finir avec le jugement de Dieu : voix énorme et barbare, assise sur l’abîme, tentant de retenir le flux de la phrase comme le géant Atlas tente de tenir le monde sur ses épaules – une voix qui n’est plus même celle du poète Artaud mais la voix de la terre, celle qui vient des entrailles du corps morcelé, happant le réel avec un « rire d’or », comme le voulait Nietzsche, pour le digérer et nous le rendre à l’état de merde « l’Etre, c’est du caca » profère Artaud.
Si je suis très vite perdu dans ce roman, je peux bien dire que cette perte me dérange mais elle ne m’importune pas. Elle est le signe que quelque chose de vrai a lieu. C’est pourquoi je peux dire que j’aime me perdre dans un texte comme celui de Ghislain Ripault ; j’aime y perdre la notion quotidienne de l’espace et du temps, comme j’aime me perdre dans une ville, surtout quand il s’agit de la mienne, et ce n’est pas perdre mon chemin mais plutôt perdre l’habitude de suivre un chemin. L’art de l’écrivain se joue aussi dans ces moments exquis mais furtifs où nous avons cette impression vitale de retrouver nos repères habituels, l’espace et le temps ordinaires, la phrase classique, le respect amoureux de la grammaire qui n’en demande pas tant. J’aime aussi ces moments-là, éclairés par une image suggestive qui rentre dans l’ordre habituel de nos sensations, comme on dit de quelqu’un qu’il « rentre chez lui », ou bien par ces néologismes et ces jeux de mots que Ghislain Ripault pratique avec beaucoup de verve et d’humour, et qui contribuent à rendre plus légère notre errance avec lui.
Ainsi lisant et relisant ce roman, sans jamais me lasser, j’ai pour moi cette sensation délicieuse et angoissée d’une navigation en haute mer, où rien n’est jamais vraiment assuré comme à la lecture d’un koan qui terrifie l’ego, –- une traversée qui ne cesse d’avoir lieu et pour laquelle il n’existe aucun retour : le sentiment de l’existence, qui est, je le crois, ce que la littérature peut me donner de mieux.

Pierre Godo, revue japonaise SUIRO (courant [d'eau]), 2008) (texte traduit en japonais)

"Poète, romancier, nouvelliste et éditeur, Ripault est aussi un virtuose de la digression, maître es néologismes ! Il ripe, rape, rabote, étripe, triture la peau et les os de la poésie des mots. Dans la lignée qui va de Villon à Ducharme en passant par Sterne, Swift, Joyce et Arno Schmidt, cet auteur suit un précepte vital : il tente de contrer l'affadissement mondialisé en aimant sauvagement la langue, en la tirant, couplant, pour lui faire une tripotée d'enfants criaillant, bien joufflus, pétant de santé... A nos questions les plus inavouables comme à nos phrases/formules toutes faites, l'écrivain n'apporte ni validation ni infirmation. Il écrit, c'est suffisamment compliqué comme ça : dans le refus de la mode et du prêt à penser commercial. Ne le suivez pas sans vous perdre, vous gagnerez à le suivre, on ne sait où, mais on s'en fout." 

Jean-Marc Couve, Traction Brabant, n°19

Nuit, rencontres, conversations rudes, fantasmes érotiques, on ne peut résumer ce livre ni le classer tant il échappe aux cadres habituels. Ghislain Ripault écrit magnifiquement, surprend sans cesse, entre narration et poèmes. Malgré cela, on a du mal à se fixer sur les visions qu’il propose, tant elles glissent, à peine évoquées. Pour les amateurs avertis.

Sitartmag, Anne-Marie Mercier-Faivre

"Les éditions Rhubarbe, nouvellement créées par Alain Kewes à Auxerre, publient leur sixième titre, dans une présentation tou­jours aussi soignée. Et, comme pour les précédents, il s'agit d'un texte plutôt court (à peine plus de 8o pages) et, surtout, difficile­ment classable. C'est la règle chez Rhubarbe, et ça l'est plus encore chez Ghislain Ripault, qui signe donc ici « Le Désert de l'em­pailleur ».

Le résumer n'aurait aucun sens, comme s'amuse d'ailleurs à le rappeler l'auteur en quatrième de couverture: « Autant ne rien écri­re qui pourrait aisément se ratati­ner, quelques lignes, une dizaine, terminé, au suivant. » Voilà qui met à l'aise le critique ! Mais après tout, ça lui reste bien ; quand on choisit la littérature pour s'aérer les neurones, on sait à quoi s'en tenir: tout ce qui occu­pe 100 pages et qui pourrait tenir en une seule, n'en est pas ! Donc, lui reste le « casse-tête » des vrais livres, dont il ne saura jamais vraiment rendre compte, (mais dont il peut toujours parler), ou la soupe bien délayée, élaborée selon les lois du genre.

Tel n'est certes pas le cas avec Ghislain Ripault - auteur (une quinzaine d'ouvrages depuis 1972) de poésie, de nouvelles, de chroniques et de romans - qui ne se laisse enfermer dans aucun conformisme narratif. Les noms des personnages (K.O.K Quasi, Judicaël Deux, 078 et 005, les deux zombides lancés dans l'épo­pée d'un voyage en Norvège, ou encore celui du narrateur lui­-même, Jmoi) annoncent déjà qu'on entre dans un parcours déroutant. Il l'est et le revendique, puisque son intérêt réside dans les bifurcations nombreuses de la digression (« digressions caracté­risées » annonçait Ripault dans le titre d'un précédent livre). Les dialogues, eux non plus, n'ont rien de convenus. Quant à l'histoi­re, à vrai dire, il y aurait peu à raconter si l'on voulait s'y risquer, ce qui ne signifie pas qu'il ne se passe rien dans les livres de Ripault. Bien au contraire, on ne cesse d'y rebondir. Moins sur les événements, cependant, que sur les mots. Les péripéties ici sont lexicales, l'aventure langagière. Tout est dans le style, celui de l'empailleur qui rhabille ses per­sonnages de l'intérieur. Un style qui par glissements et dérives joue de la langue et de ses répon­dants souterrains, voire incons­cients. Une écriture qui, de « jour sans frein » en « droit de cécité », de clins d’œil en jeux de mots, calembours et inventions en tout genre, s'amuse beaucoup de ses polyphonies. Sans compter qu'on est aussi dans une construction en abîme, avec un personnage écri­vain et ce fameux « nègre Jmoi tapi dans les coulisses » qui se revendique à l'occasion de Burroughs et brouille un peu les cartes. On l'aura compris, cette écriture qui ne se prend pas au sérieux, mais qui est particulière­ment dense et jubilatoire, se veut toujours sous tension. Elle vaut le détour, mot-clef, sans doute, de tout chemin d'encre."

Michel Baglin, Brèves n°78

 

"Ghislain Ripault se délecte du verbe.(...) Il joue avec les mots, calembours ou mots-valises, ses sagaies, ses saillies font feu de tout bois..." 

Jacmo, Décharge n°130